Quatorze mâles avec le gène Fintech

Mon éditorial

Je continue à préciser mon champ de recherche pour 2018. Je sais déjà que je me concentre sur quatre domaines, partiellement liées l’une à l’autre : les villes intelligentes, le Fintech, les énergies renouvelables et le phénomène d’intelligence collectives. Je sais qu’à part la recherche proprement dite, je veux développer un produit pédagogique où j’enseignerai les sciences sociales par le moyen d’engager mes clients-étudiants dans ma propre recherche. Je sais aussi que cet enseignement aura pour base l’observation et l’analyse empirique des variables suivantes : densité de population, croissance démographique, prix de l’immobilier, la taille des soldes et des flux du Fintech comme pourcentage du PIB, la consommation finale de l’énergie, la part d’énergies renouvelables dans ladite consommation finale, l’amortissement agrégé d’actifs fixes comme pourcentage du PIB et finalement le développement des institutions que je juge significatives pour étudier le phénomène d’intelligence collective.

Je suis d’humeur exploratrice et je combine des différentes sortes de données empiriques. Je prends donc le rapport sur l’industrie Fintech par PWC , intitulé « Global FinTech Report 2017. Redrawing the lines: FinTech’s growing influence on Financial Services ». En général, le rapport présente les résultats d’une enquête conduite par Pricewaterhouse Coopers parmi les entreprises liées directement ou indirectement à la finance. Voilà que je trouve un graphique à la page 7. C’est le graphique no. 6, qui montre la distribution de deux variables :

  1. Le pourcentage des compagnies enquêtées, couramment engagées dans des partenariats avec les compagnies Fintech
  2. Le pourcentage des compagnies enquêtées qui espèrent d’accroître leur participation dans des partenariats avec les compagnies Fintech dans les 3 – 5 années à venir

Je reproduis le contenu de ce graphique 6 dans Tableau 1, ci-dessous. Comme je suis en train de me lancer dans la carrière d’un pédagogue en ligne (pédagogue aligné ?), j’ai envie de faire un peu de travail pédagogique avec ces données. Je suis mes envies et je suis dans ma foulée et je vous revois à l’autre bout du Tableau 1, un peu plus loin ci-dessous.

Tableau 1

Pays Pourcentage des compagnies enquêtées couramment engagées dans des partenariats avec les compagnies Fintech Pourcentage des compagnies enquêtées qui espèrent d’accroître leur participation dans des partenariats avec les compagnies Fintech dans les 3 – 5 années à venir
Allemagne 70% 78%
Belgique 69% 81%
Pays-Bas 65% 85%
Australie et Nouvelle Zelande 64% 83%
Afrique du Sud 63% 96%
Canada 62% 88%
Finlande 62% 100%
Singapore 62% 89%
Suisse 59% 82%
Indonésie 55% 94%
Fédération Russe 54% 74%
Etats Unis 53% 88%
Taiwan 52% 68%
Argentine 50% 83%
France 45% 90%
Monde – moyenne 45% 82%
Pologne 44% 64%
Royaume Uni 44% 81%
Hongrie 43% 74%
Inde 42% 95%
Luxembourg 42% 83%
Italie 41% 84%
Chine continentale 40% 68%
Irlande 40% 71%
Hong Kong SAR 37% 82%
Danemark 36% 81%
Mexique 31% 81%
Brésil 30% 72%
Japon 30% 91%
Colombie 25% 93%
Turquie 22% 76%
Corée du Sud 14% 76%

Source : https://www.pwc.com/gx/en/industries/financial-services/assets/pwc-global-fintech-report-2017.pdf dernier accès 26 Janvier 2018

Bon, allons-y avec l’analyse. Tout d’abord, essayons de comprendre ce que le poète a bien voulu dire. En l’occurrence, le poète c’est la société de conseil Pricewaterhouse Coopers et le poème c’est la signification de ces deux pourcentages. Un pourcentage est la fréquence avec laquelle quelque chose survient. Prenons l’échantillon complet des compagnies enquêtées par PwC. Dans cet échantillon, certaines compagnies sont couramment engagées dans des partenariats avec les compagnies Fintech, pendant que d’autres ne le sont pas. C’est comme un gène dans l’ADN d’une entité vivante. Ça peut être branché ou débranché, ce que nous pouvons noter mathématiquement comme, respectivement, 1 ou 0. La même chose pour ce second pourcentage : celui des compagnies enquêtées qui espèrent d’accroître leur participation dans des partenariats avec les compagnies Fintech dans les 3 – 5 années à venir. Encore une fois, c’est un gène qui peut être en position active (1) ou passive (2). Nous avons donc deux gènes distribués dans la population générale d’entités interviewées par PwC et deux variables digitales, notées sur une échelle discrète binomiale {0, 1}. Du point de vue mathématique, le truc le plus immédiat que je peux faire avec une variable binomiale consiste à dresser une distribution binomiale classique de Bernoulli ou bien une distribution Bayésienne. Du point de vie cognitif, si j’ai quelque chose qui ressemble à un code génétique, je me pose deux questions : est-ce que ce que j’ai devant mes yeux est un code complet ou juste le fragment d’un tel code et, d’autre part, comment ce code (fragment de code) peut bien se transmettre de génération en génération ?

Je développe, d’abord, sur la méthode génétique, pour aller ensuite vers les maths des distributions binomiales. Est-ce que le contenu du Tableau 1 reflète un code génétique complet ou est-ce juste le fragment d’un code ? Intuitivement je peux dire, et ceci avec beaucoup de certitude, que c’est juste un fragment. Les entreprises et les institutions financières ont beaucoup plus des caractéristiques importantes à part ces deux traits exprimés dans l’enquête. Si j’ai juste le fragment du code génétique d’un dinosaure, le truc vraiment chouette est de découvrir les gènes manquants et de reconstruire l’ADN en entier. Est-ce un carnassier féroce, partant pour une carrière hollywoodienne, ou bien est-ce un herbivore paisible, fait tout au plus pour des rôles de second plan ? Tableau 1 m’inspire à chercher les gènes manquants qui font : a) une organisation engagée en partenariat avec un fournisseur de technologie Fintech b) une organisation qui envisage un accroissement de participation dans un tel partenariat.

Dans la recherche de ces gènes frappants par leur absence, un peu de logique peut servir. Si je compare les valeurs numériques dans les deux colonnes de tableau 1, le pourcentage dans la colonne de droite est toujours plus grand que celui dans la colonne de gauche. Le gène de droite est enclenché plus fréquemment que le gène de gauche et j’écris ceci sans l’ombre d’une allusion politique. Logiquement, il peut y avoir quatre cas de figure. Premièrement, une compagnie peut être déjà engagée dans un partenariat avec un fournisseur Fintech et « accroître la participation » a un sens littéral. C’est le cas de deux gènes enclenchés en même temps. Notons-le comme FH(t) = 1 et FHe(t) = 1. Le symbole FH(t) veut la présence ou l’absence de partenariat Fintech au moment donné t; par analogie, FHe(t) symbolise la présence ou l’absence des plans d’accroître la participation. Le « e » en registre de bas est une référence sentimentale au terme « espéré » dans les sciences économiques. Deuxièmement, une organisation n’a pas de tel partenariat dans son portefeuille d’affaires et « accroître » veut dire « démarrer de zéro ». Là, le gène FH(t) est dans la position FH(t) = 0 et le gène FHe(t) est enclenché en FHe(t) = 1.  Troisièmement, une compagnie est déjà engagée dans un tel partenariat et elle se sent repue avec, sans stratégie d’accroissement de participation, donc j’ai FH(t) = 1 et FHe(t) = 0. Finalement, il peut y avoir des cas de FH(t) = 0 et FHe(t) = 0 donc pas de partenariat et pas de plans.

Je passe au mécanisme de transmission génétique. Le Fintech est un phénomène d’origine récente. En termes d’ADN du business, c’est une mutation. Elle a pu avoir lieu de deux façons distinctes : soit comme le réveil d’un gène récessif, longtemps assoupi, soit comme une mutation spontanée complètement nouvelle. Quoi qu’il en soit, ces pourcentages dans le tableau 1 ont tous une histoire : leurs valeurs respectives reflètent l’état courant des processus qui les ont créés. Si dans mon pays, la Pologne, 44% d’institutions enquêtées déclarent avoir un partenariat avec un fournisseur Fintech, je peux être presque certain qu’avant ça il y avait un moment avec 34%, encore plus tôt il y en avait un marqué par 24% et ainsi de suite. Toute histoire est une concurrence des séquences différentes qui produisent des évènements différents. Je veux dire qu’il y a quelques 4 155 000 entreprises en Pologne, dont à peu près 33 000 (8%) sont suffisamment grandes pour penser de créer des partenariats Fintech. Quarante-quatre pourcent de 33 000 fait 14 520 entités. Je peux appliquer la même logique à la France. Selon INSEE en mars 2017 il y avait 4 226 488 entreprises en France et en gardant les mêmes proportions j’assume que dans cette population générale quelques 0,8% – soit 33 600 – sont de taille suffisante pour s’engager dans des partenariats Fintech. Tableau 1 me dit que 45% de parmi eux sont effectivement engagés dans de tels partenariats, ce qui fait 15 100 entités. Un autre pays, la Belgique, en tête de liste en termes de fréquence des partenariats Fintech. La Belgique, c’est une population d’à peu près 210 000 entreprises et j’applique le même calcul à cette population. Le noyau dur des grands costauds, capables de s’engager dans des partenariats Fintech : 0,8% de la population générale fait 1682 entités et les 69% indiqués dans tableau 1 fait 1 160.

Je viens d’estimer, très grossièrement, il est vrai, trois populations nationales d’entreprises engagées dans des partenariats Fintech : Pologne, France, Belgique. Si je veux reconstruire leur génome complet, je peux suivre les types d’histoires individuelles qui les ont amenés à former de tels partenariats. Ensuite, je pourrai me demander comment ces types de biographies d’affaires ont bien pu se reproduire dans 69% des cas enquêtés en Belgique et seulement dans 45% en France. Quel est le mécanisme qui a bâti ces pourcentages et ces populations d’entreprises ? Bien sûr, la question reste ouverte. Encore, j’ai une bonne occasion pour montrer les traits distinctifs de la méthode évolutionniste, que je viens de suggérer fortement à travers cette métaphore de gènes. J’ai déjà mentionné dans l’une de mes mises à jour précédentes, celle intitulée “Une courbe élégante en « S » aplati” , que le modèle classique pour simuler la propagation d’une nouvelle technologie est celui de la contagion, qui est la reproduction d’un organisme, pas la propagation d’un gène. Si je veux appliquer la logique évolutionniste, j’ai besoin d’une optique légèrement différente. L’histoire approchée en des termes évolutionnistes est une séquence de générations, dont la succession repose sur la reproduction sexuée. Il y a des entités mâles et des entités femelles. Le mâle ici c’est l’entité qui donne l’information sur le concept de finance à pratiquer et la femelle c’est le capitaliste – individuel ou institutionnel – qui finance l’application de l’idée. Supposons que le Fintech est une mutation. A l’aube de temps il n’y avait que des mâles sans gène Fintech et à un certain moment – faute d’une meilleure idée disons que c’était le 3 janvier 2009, la date départ de Bitcoin – quatorze mâles avec le gène Fintech étaient apparus, qui étaient les 14 premières adresses enregistrées dans le réseau. Le 17 août 2010, le Bitcoin a eu sa première cotation en dollars américains, donc c’est à ce moment-là que la reproduction capitaliste de l’idée a commencé. A l’époque il y avait quelque 300 – 500 adresses dans le réseau. Question (apparemment) bête : comment une mutation spontanée avait-elle pu se propager de 14 adresses jusqu’atteindre 300 ? En retournant à mes populations d’entreprises, et en passant (momentanément) sur l’exactitude de ces estimations, si je veux étudier ces populations en des termes génétiques et évolutionnistes, j’ai besoin d’une donnée importante : quelle génération consécutive avons-nous devant nos yeux ? Ces populations représentent-elles la première génération des porteurs du gène FH(t) = 1 ou bien sont-elles des descendants de ladite première génération ?

Maintenant, je change de sujet. Ceux parmi vous qui ont bien voulu suivre mon activité de blogger sur l’année dernière ont probablement vu que mon objectif est de créer de la science de bonne qualité, neuve ou presque. Sur mon chemin vers la création d’un site éducatif payant je passe par le stade de financement participatif. Voici le lien hypertexte de mon compte sur Patreon . Si vous vous sentez prêt à cofinancer mon projet, vous pouvez vous enregistrer comme mon patron. Si vous en faites ainsi, je vous serai reconnaissant pour m’indiquer deux trucs importants : quel genre de récompense attendez-vous en échange du patronage et quelles étapes souhaitiez-vous voir dans mon projet de création de site éducatif ?

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