Je développe sur le concept que je viens d’esquisser dans ma dernière mise à jour en anglais : « Another idea – urban wetlands ». C’est un concept d’entreprise et concept environnementaliste en même temps : un réseau d’étangs et des cours d’eau qui serviraient à la fois comme réserve d’eau et l’emplacement pour un réseau des petites turbines hydrauliques. Oui, je sais, je n’en ai pas encore fini avec EneFin, le concept financier. Je compte de l’appliquer ici de façon créative. Point de vue mécanique des liquides, l’esquisse de l’idée est la suivante. On a besoin d’une rivière qui sera la source primaire d’eau pour le système. Dans les environs immédiats de cette rivière nous construisons un réseau des cours d’eau et d’étangs. Les étangs jouent le rôle des réservoirs naturels d’eau. Ils collectent un certain surplus d’eau de pluie conduite par la rivière. De cette façon, l’eau de pluie est mise en réserve.
Les cours d’eau connectent la rivière avec les étangs ainsi que les étangs entre eux. Les cours d’eau ont une double fonction. D’une part, ils sont l’emplacement à proprement dit des petites turbines hydrauliques qui produisent l’électricité. D’autre part, ils assurent de la circulation d’eau dans le système afin de minimiser la putréfaction de débris organiques dans les étangs et par la même façon de minimiser l’émission de méthane. Le tout est complété par les cultures d’arbres et arbustes. Ces grosses plantes vertes ont une double fonction aussi. D’une part, leurs racines servent de stabilisateurs pour le sol du système, qui en raison de l’abondance d’eau peut avoir tendance à bouger. D’autre part, ces plantes vont absorber du carbone de l’atmosphère et contrebalancent ainsi les émissions des gaz de putréfaction des étangs.
La façon dont le système entier se présente dépend de la dénivellation relative du terrain. Le design de base c’est dans le terrain plat (ou presque) où la circulation d’eau dans le réseau est forcée par la pression provenant de la rivière. La présence des monts et vallées change le jeu : à part la pression de flux riverain, on peut utiliser les siphons romains pour créer un courant additionnel.

Je sais que dès un système comme celui-là est proposé, l’objection courante est celle à propos des moustiques. Des étangs à proximité d’habitations humaines veulent dire des tonnes de moustiques. L’une des observations pratiques sur lesquelles je me base est que ça arrive de toute façon. Je peux observer ce phénomène chez moi, en Pologne du sud. Année après année, certains endroits progressivement s’imbibent d’eau. Des petits creux de terrains se transforment en des marais microscopiques. Des complexes résidentiels entiers dans les banlieues des grandes villes connaissent des vagues de travaux de rénovation pour renforcer l’isolation hydrophobe des fondements. Oui, ça arrive déjà et le problème c’est que ça pose que des problèmes, sans retombés positifs niveau accès à l’eau potable. Autant civiliser le phénomène. Ci-dessous, je présente une carte d’Europe Centrale et Méridionale, où les emplacements des vallées fluviales sont marqués.
En plus, on peut de débarrasser des moustiques – ou les rendre, au moins, presque inoffensifs – avec l’aide de la végétation adéquate. J’ai fait un peu de recherche et voilà la liste des plantes qui repoussent les moustiques et qui donc, si plantées abondamment à travers ces structures faites d’étangs et des cours d’eau, peuvent largement résoudre ce problème-là : la citronnelle (Cymbopogon nardus), la mélisse officinale (Melissa officinalis), la cataire (Nepeta cataria)
le souci officinal (Calendula officinalis), la rose d’Inde (Tagetes erecta), l’œillet d’Inde (Tagetes patula), la Tagète lucida (Tagetes lucida), la Tagète citron (Tagetes tenuifolia), Baileya multiradiata (pas de nom français distinctif, pour autant que je sache), le populage des marais (Caltha palustres), le basilic (Ocimum basilicum), la lavande (famille Lamiacae), la menthe poivrée (Mentha x piperita), l’ail (Allium sativum), la menthe pouliot (Mentha pulegium), le romarin (Rosmarinus officinalis) et finalement les géraniums (famille Geraniums).

Source: https://www.eea.europa.eu/data-and-maps/figures/floodplain-distribution dernier accès 20 Juin 2019
Ah, oui, j’ai oublié : dans un premier temps, je veux étudier la possibilité d’installer tout ce bazar dans l’environnement urbain, quelque chose comme des marais civilisés et citadins, Ça fait plus d’un an que j’ai abordé le sujet des villes intelligentes et ben voilà un concept qui va à merveille. Je veux développer cette idée comme projet de promotion immobilière. Je me suis dit que si je réussis à y donner une forme purement entrepreneuriale, ce sera le test le plus exigeant en termes de faisabilité. Je veux dire que si c’est profitable – ou plutôt s’il y a des fortes chances que ce soit profitable – le concept peut se développer sans aide publique. Cette dernière peut apporter du changement positif additionnel, bien sûr, mais le truc peut se développer par la force des marchés locaux de l’immobilier. Voilà donc que je considère la valeur économique d’un projet comme la valeur actuelle nette du flux de trésorerie. Sur un horizon de « n » périodes, deux choses adviennent : le projet génère un flux de trésorerie, d’une part, et il note un changement de valeur du marché d’autre part. La formule que je présente ci-dessous est une modification de celle présentée par Hatata et al. 2019[1]. À part une notation légèrement modifiée, j’élimine la catégorie séparée des coûts de maintenance des installations et je les inclue dans la catégorie générale des coûts opérationnels. En revanche, si les dépenses sur la maintenance courante des installations sont une compensation de l’amortissement physique et donc s’ils constituent des additions à la valeur brute des biens immobiliers, on les compte comme investissement.

Je commence l’application empirique de la formule par étudier le marché des terrains de construction en Europe, plus spécialement dans les zones riveraines. Je retourne à la comparaison entre ma ville natale, Krakow, Pologne, où je vis, en Lyon, France, où j’avais passé quelques années autant troublées qu’intéressantes de mon adolescence. Krakow d’abord : 1 mètre carré de terrain de construction, dans la ville-même, coûte entre €115 et €280. À Lyon, la fourchette des prix est plus large et plus élevée : entre €354 et €1200 par m2.
Question : quelle superficie pourrait bien avoir un terrain urbain transformé en ce marécage artificiel ? Question dure à répondre. J’essaie de l’attaquer par le bout aquatique. Ce système a pour une des fonctions de stocker, dans le réseau d’étangs, suffisamment d’eau de pluie pour satisfaire la demande de la population locale et de laisser encore un surplus résiduel. J’ai fait un peu de recherche sur la quantité d’eau consommée dans les ménages. En fait, il y a peu de données claires et sans équivoque sur le sujet. La source qui a l’air d’être la plus sérieuse est AQUASTAT – Système d’information mondial de la FAO sur l’eau et l’agriculture.
Une déconstruction prudente des données publiées par la Banque Mondiale indique que la consommation domestique d’eau en France est d’à peu près 81 ÷ 82 m3 par personne par an, soit entre 81 000 et 82 000 litres. En Danemark, c’est à peu près 59 ÷ 60 m3 par personne par an (59 000 ÷ 60 000 litres) et je n’ai aucune idée où cette différence peut bien venir. J’ai déjà éliminé l’usage non-domestique, au moins selon la structure logique des données présentées par la banque mondiale. En revanche, lorsque j’ai étudié quelques publications polonaises sur le sujet, il paraît que la consommation domestique d’eau est plutôt répétitive à travers l’Europe et elle oscille entre 36 et 40 m3 par personne par an.
Il y a certainement une source de ces disparités : la distinction entre, d’une part, la consommation ménagère strictement comptée, avec des compteurs d’eau associés aux personnes précises et d’autre part, la consommation personnelle totale, y compris l’usage d’eau de puits et d’eau en bouteilles et bidons. Du point de vue hydrologique, chaque endroit sur Terre reçoit une certaine quantité d’eau Ep de précipitations atmosphériques – donc de pluie ou de neige – ainsi qu’à travers des rivières qui apportent l’eau des territoires adjacents. Le même endroit déverse une quantité définie Ed d’eau dans les mers et océans adjacents, à travers les fleuves. Le territoire entier perd aussi une quantité définie Ev d’eau par évaporation. La différence Er = Ep – Ev – Ed est la quantité absorbée par le territoire.
Lorsque nous, les humains, utilisons l’eau dans notre vie quotidienne, la plupart de cette consommation atterrit dans des égouts de toute sorte, qui la conduisent vers et dans le réseau fluvial. Oui, lorsque nous arrosons nos jardins, une partie de cette eau s’évapore, mais la grande majorité de notre consommation d’eau entre dans la composante Ed ci-dessus. Le flux Ed peut être décomposé en deux sous-flux : le flux strictement naturel Ed-n d’eau qui coule tout simplement, ça et là, et le flux Ed-h qui passe à travers l’utilisation humaine. Pour être tout à fait précis, on peut adopter la même distinction pour l’eau d’évaporation, donc Ev = Ev-n + Ev-h.
Le sentier conceptuel préliminairement défriché, je peux passer en revue un peu de littérature. Katsifarakis et al. (2015[1]) décrivent l’application d’une structure urbaine appelée « jardin pluvial » (« rain garden » en anglais). Grosso modo, un jardin pluvial est une agglomération des structures superficielles qui favorisent la collection d’eau de pluie – égouts, puits, arbustes, près humides, étangs ouverts – avec des structures souterraines qui favorisent la rétention de la même eau dans des couches successives du sol. Ici, ‘y a un truc intéressant que l’article de Katsifarakis et al. suggère comme attribut possible d’un jardin pluvial : le drainage inversé. Normalement, les tuyaux de drainage servent à éconduire l’eau de pluie en dehors du terrain donné. Cependant, il est possible d’enfoncer les tuyaux de drainage verticalement, vers et dans les couches profondes du sol, pour favoriser la rétention d’eau de pluie dans des poches souterraines profondes, un peu comme des poches artésiennes. J’ai essayé de présenter l’idée visuellement ci-dessous. Normalement, un étang, ça se creuse jusqu’à ce qu’on arrive à une couche géologique imperméable ou peu perméable. C’est comme ça que l’eau reste dedans. Si en-dessous de cette couche imperméable il y a une nappe perméable et poreuse, capable de retenir de l’eau, une nappe aquifère peut se former dans les roches sous l’étang. L’étang de surface est alors une structure de captage et la rétention proprement dite survient dans l’aquifère sous-jacent. Remarquez, faut faire gaffe avec le drainage renversé et les aquifères. Ça marche bien dans des endroits vraiment plats et naturellement fluviaux, comme dans les plaines riveraines d’une rivière. C’est plat et – grâce au boulot qu’avaient fait les glaciers, dans le passé – ça contient des larges poches sableuses insérées entre des nappes rocheuses imperméables. En revanche, si le terrain est en pente ou bien s’il se termine par une falaise, un aquifère peut provoquer des glissements de terrain gigantesques.

Alors, voyons voir comment des trucs comme drainage inversé peuvent marcher pour stocker l’eau de pluie ou bien celle d’inondation. Je m’en tiens à mes deux exemples : Krakow en Pologne et Lyon en France. En France, les précipitations annuelles moyennes[1] sont de 867 milimètres par an par mètre carré ; en Pologne, c’est 600 mm. Un milimètre de précipitation par mètre carré veut dire 1 litre, donc 0,001 mètre cube. En France, le mètre carré moyen de territoire collecte donc 0,867 m3 de précipitations annuelles, avec une consommation moyenne ménagère d’environ 81,69 m3 par personne par an. Pour que la personne moyenne aie sa consommation d’eau contrebalancée par le stockage d’eau de pluie, il faut donc 81,69 m3 / 0,867 [m3/m2] = 94,23 m2 de surface de collection d’eau. Ajoutons à ceci un surplus de 20%, à titre de stockage résiduel par-dessus la consommation courante : ceci fait 94,23 m2 * 1,2 = 113,07 m2. En d’autres mots, en France, l’eau de pluie (ou neige) collectée de la surface d’environ 113 ÷ 114 mètres carrés de terrain ouvert exposé directement aux précipitations peut pourvoir, si captée proprement, à la consommation moyenne d’eau d’une personne plus un résidu mis en réserve.
En ce qui concerne la Pologne, même la source la plus exhaustive, donc AQUASTAT de FAO, ne donne pas d’estimation de consommation d’eau par personne. Je vais donc faire un petit tour de maths, prendre les estimations pour la France et les comparer avec un pays voisin à tous les deux, donc l’Allemagne : consommation totale d’eau par personne par an égale à 308,5 mètres cube, dont la consommation ménagère devrait prendre à peu de choses près 20%, soit 62 m3. J’assume donc qu’un Polonais moyen consomme ces 62 m3 d’eau par an, j’y ajoute 20% pour stockage résiduel, ce qui me fait 74,4 m3. Je divise ça par les 0,6 m3 de précipitations annuelles par mètre carré. En fin de compte j’obtiens 124 m2 de surface arrangée en jardin pluvial. Encore une fois, je résume graphiquement.

Je reviens à la revue de littérature. Shao et al. (2018[1]) présentent un concept similaire au mien : la ville – éponge ou « sponge city » en anglais. La ville – éponge absorbe l’eau et le carbone. E plus, grâce à l’absorption de l’eau pluviale, la ville – éponge a besoin de moins d’énergie pour pomper l’eau dans l’infrastructure urbaine et de cette façon une telle structure dégage moins de CO2. La ville – éponge combine la verdure et les jardins pluviaux avec des zones marécageuses, comme le concept que j’essaie de développer. Selon les estimations présentées par Shao et al., la capacité d’absorption de carbone dans des villes – éponges déjà mises en place en Chine est très variable : de 4,49 grammes de carbone par an par mètre carré dans les marécages des plaines du Nord – Est de Chine jusqu’à 56,67 grammes par an par mètre carré dans les marécages des lacs des plaines orientales. Shao et al. présentent une analyse détaillée de la ville de Xiamen. Avec 3,5 millions d’habitants, une surface totale de 1 865 km2 et son infrastructure de ville – éponge couvrant à peu près 118 kilomètres carrés, la ville de Xiamen compte retenir 17,18 millions des mètres cubes d’eau de pluie par an, à travers la technologie des structures – éponge.
Pour
donner une image complète, il faut dire que Xiamen note des précipitations tout
à fait significatives : 1131 millimètres par an, selon le service Climate-Data.org[2]. Bon, calmons le jeu,
parce qu’il y a quelque chose qui cloche dans ces calculs de par Shao
et al. J’assume que l’infrastructure de la ville – éponge collecte l’eau de
pluie de toute la ville, donc que les 118 km2 de cette infrastructure absorbent
l’eau qui tombe sur la surface totale des 1 865 km2 de la ville. Les
précipitations annuelles de 1131 millimètres – donc 1,131 m3 – par mètre carré donnent
1865000 m2 * 1,131 m3/m2 = 2 109 315 m3.
Cela voulait dire que selon les calculs de Shao
et al. l’infrastructure – éponge de Xiamen absorbe 8 fois plus d’eau de
pluie qu’il y a de pluie. Ambitieux mais peu réaliste. La hydrologie, c’est compliqué.
Je
continue à vous fournir de la bonne science, presque neuve, juste un peu
cabossée dans le processus de conception. Je vous rappelle que vous pouvez
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[1] Shao, W., Liu, J., Yang, Z., Yang, Z., Yu, Y., & Li, W. (2018). Carbon Reduction Effects of Sponge City Construction: A Case Study of the City of Xiamen. Energy Procedia, 152, 1145-1151.
[2] https://en.climate-data.org/asia/china/fujian/xiamen-2623/ dernier accès 30 Juin 2019
[1] https://data.worldbank.org/indicator/AG.LND.PRCP.MM dernier accès 30 Juin 2019
[1] Katsifarakis, K. L., Vafeiadis, M., & Theodossiou, N. (2015). Sustainable drainage and urban landscape upgrading using rain gardens. Site selection in Thessaloniki, Greece. Agriculture and agricultural science procedia, 4, 338-347.
[1] Hatata, A. Y., El-Saadawi, M. M., & Saad, S. (2019). A feasibility study of small hydro power for selected locations in Egypt. Energy Strategy Reviews, 24, 300-313.