Laisse tomber les modèles d’entreprise

Une fois de plus, j’ai eu du décalage entre mes mises à jour. Remarquez, ça a été un décalage productif. J’ai développé un peu sur le sujet des voitures électriques. J’ai discuté le sujet avec quelques-uns de mes collègues, que j’avais invité à participer au projet et j’ai changé un peu d’optique. Le premier truc est abjectement opportuniste : la formulation de sujet. L’un de mes collègues a dit : « Écoute, le modèle d’entreprise, c’est occupé. Á l’École Supérieure de Commerce, à Varsovie, il y a une équipe qui a déjà défini plus de 100 modèles distincts d’entreprise et leur truc, ça a l’air solide côté méthode. Vaut mieux pas s’engager dans de territoire. Lorsqu’il sera question d’évaluation de notre demande de financement au ministère, ces gars-là, ils vont mettre nos têtes coupées sur leurs piques. Laisse tomber. Donnons à notre projet un sujet que presque personne ne veut toucher : l’innovation et la théorie de changement technologique dans le secteur des voitures électriques ». 

J’y a réfléchi et je suis bien d’accord. De ma part, toute cette histoire de modèles d’entreprise c’était un peu forcé. J’essayais d’emballer mes idées – qui par ailleurs sont 100% dans l’étude de changement technologique – dans le paquet étiqueté « modèle d’entreprise » parce que je pensais que ça se vendrait mieux. Je viens donc de (ré)apprendre une leçon importante : reste fidèle à tes idées et ton intuition. Prendre en considération les idées des autres est une chose, mais te déguiser en ces idées en est une autre et c’est une erreur stratégique.

Puisque je rejette le déguisement et je décide de rester fidèle à mes idées, je reviens à une idée dont il est même difficile de dire que je l’ai. C’est plutôt cette idée qui m’a et son essence est la suivante : les automobiles de toute sorte, à combustion interne ou électriques, peu importe, à part de mouvoir par eux-mêmes, ont un autre trait intéressant, celui d’être des réservoirs d’énergie par eux-mêmes. Une population d’automobiles est un réseau mobile de réservoirs d’énergie. Ceci dit, voilà quelques observations intéressantes.   

Premièrement, il y a de plus en plus d’automobiles nouvelles par chaque personne nouvelle née. Les nombres de base, je les montre dans le tableau ci-dessous. Le nombre d’automobiles produites annuellement vient de https://www.worldometers.info/cars/ , pendant que la démographie est basée sur les données de la Banque Mondiale (https://data.worldbank.org/indicator/SP.POP.TOTL ). Plus loin, en-dessous du tableau numérique, je présente le même sujet graphiquement, en forme d’index 2010 = 1,00.

AnnéeAutomobiles produites globalementPopulation mondiale
1999               39 759 847       6 034 491 778 
2000               41 215 653       6 114 332 537 
2001               39 825 888       6 193 671 774 
2002               41 358 394       6 272 752 973 
2003               41 968 666       6 351 882 363 
2004               44 554 268       6 431 551 642 
2005               46 862 978       6 511 748 367 
2006               49 918 578       6 592 734 537 
2007               53 201 346       6 674 203 645 
2008               52 726 117       6 756 917 893 
2009               47 772 598       6 839 574 286 
2010               58 264 852       6 921 871 603 
2011               59 897 273       7 002 860 245 
2012               63 081 024       7 085 762 277 
2013               65 745 403       7 169 638 368 
2014               67 782 035       7 254 226 881 
2015               68 539 516       7 338 964 954 
2016               72 105 435       7 424 286 143 

Deuxièmement, il y a de plus en plus de puissance électrique installée par personne dans le monde (https://unstats.un.org/unsd/energystats/ ). C’est un fait qui apparemment a peu en commun avec les automobiles mais j’explique un peu plus loin. En tout cas, voilà les données numériques, ci-dessous. La troisième colonne, avec « Delta puissance / delta population » en tête est une valeur marginale. C’est la croissance annuelle de la puissance électrique installée divisée par la croissance annuelle analogue dans la population. Ça montre combien de kilowatts nouveaux de puissance électrique correspondent à chaque être humain nouveau sur la planète. Nous pouvons voir que ça bouge, ce quotient des deltas. Au fil des années, chaque homo sapiens reçoit plus de puissance électrique en cadeau. Enfin, pas tout à fait en cadeau : les parents de cet homo sapiens doivent payer pour l’énergie fournie par la puissance en question.     

AnnéePuissance électrique installée dans le monde (MW)Puissance électrique par tête d’habitant (kW)Delta puissance / delta population
19993 363 432,460,561,13
20003 472 904,930,571,37
20013 576 290,560,581,30
20023 754 233,590,602,25
20033 908 520,310,621,95
20044 043 439,790,631,69
20054 175 549,310,641,65
20064 367 561,020,662,37
20074 550 173,790,682,24
20084 748 664,030,702,40
20094 950 686,180,722,44
20105 182 394,400,752,82
20115 443 572,280,783,22
20125 664 728,480,802,67
20135 893 934,280,822,73
20146 170 181,660,853,27

Maintenant, j’interpose les bagnoles avec la puissance électrique et voilà : troisièmement, il y a de moins en moins d’automobiles nouvelles par chaque MW nouveau de puissance électrique installée. Si on inverse le raisonnement, il y a de plus en plus de puissance électrique nouvelle par chaque voiture nouvelle.

Nous avons donc la situation suivante : nos réserves des carburants fossiles – surtout calculés par tête d’habitant – se rétrécissent, pendant que la puissance électrique installée par tête d’habitant est en train de croître. Point de vue jus en réserve, il y a une transition vers l’électricité à partir de la combustion directe des carburants fossiles.

Je pose donc l’hypothèse que le développement des voitures électriques est une fonction émergente de notre civilisation et dans cette fonction émergente, la technologie de stockage d’énergie, dans les batteries aussi bien que dans les stations de chargement, est l’intermédiaire naturel entre la puissance électrique installée et le développement d’électromobilité.

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