Je corrèle

Je pense à ces corrélations étrangement solides que j’avais identifiées en présentant ma dernière mise à jour en anglais : « Time to come to the ad rem ». Dans la science, il y a fréquemment des moments quand une structure qu’on espérait solide s’avère être carrément une illusion. Dans ce cas précis, c’est l’inverse : j’espérais trouver des relations de tout ce qu’il y a de plus accidentel et ce que j’ai effectivement trouvé est une structure solide comme du béton, à première vue. Alors voilà, je fus inspiré par la lecture de cette demande de brevet no. EP 3 214 303 A1déposée auprès de l’Office Européen des Brevets. C’est une turbine éolienne à l’axe vertical, donc un de ces trucs suffisamment petits pour être installés dans la proximité immédiate d’habitations humaines. En même temps, avec des vents que nous pouvons rencontrer dans les régions côtières, ce machin pourrait changer profondément l’accès à l’énergie (consultez Ma petite turbine éolienne à l’axe vertical). Une petite merveille.

Alors j’avais flâné un peu du côté de https://patents.google.comet j’avais fait une sélection sémantique des demandes de brevet dans le domaine des turbines éoliennes à l’axe vertical. Comme c’était une recherche sémantique, donc par l’expression clé en anglais (« wind turbine with vertical axis »), je pensais que je vais tomber sur tout un tas des malentendus, par exemple des inventions qui concernent, en fait, des turbines à l’axe horizontal mais parlent de quelque chose à propos de l’axe vertical du mât principal. Cependant, au lieu de tout un tas de bruit statistique, j’étais tombé sur une régularité étonnante, tellement étonnante que je la reproduis une fois de plus, dans Tableau 1 ci-dessous :

Tableau 1

  Nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical
Année Office Européen des Brevets (EPO) % du total des demandes de brevet relatives à l’éolien, chez EPO US Patent & Trademark Office (USPTO) % du total des demandes de brevet relatives à l’éolien, chez USPTO Office des Brevets de la République Populaire de Chine (CH) % du total des demandes de brevet relatives à l’éolien, chez CH
[a] [b] [c] [d] [e] [f] [g]
2001 616 41,5% 1266 38,5% 369 29,1%
2002 599 37,8% 1294 38,3% 478 27,0%
2003 645 37,6% 1491 40,0% 645 27,0%
2004 806 40,7% 1703 40,7% 961 29,9%
2005 821 41,7% 1744 38,8% 1047 25,7%
2006 937 44,1% 1999 39,4% 1553 27,6%
2007 960 40,0% 2150 38,4% 1844 27,3%
2008 1224 44,5% 2454 39,4% 2342 26,7%
2009 1445 45,4% 2813 40,2% 2497 22,8%
2010 1746 46,6% 3482 42,4% 3298 24,8%
2011 2006 44,9% 3622 39,3% 4139 23,1%
2012 1886 42,1% 3699 39,0% 4551 20,6%
2013 1781 41,8% 3829 39,2% 5307 20,2%
2014 1800 38,8% 4074 40,4% 5740 18,1%
2015 1867 42,5% 4013 40,2% 7870 19,6%
2016 1089 39,8% 3388 40,6% 9325 20,4%
2017 349 42,9% 2115 42,7% 9321 22,3%

Je pense que vous pouvez aisément deviner ce qui m’avait tellement étonné : les résultats d’une sélection sémantique qui aurait dû donner des nombres au moins quelque peu aléatoires montre quelque chose de presque irréellement cohérent. Pour ceux qui ne sont pas vraiment potes avec la recherche quantitative : croyez-moi, les nombres dans Tableau 1 sont tellement réguliers qu’ils ont l’air d’une simulation mathématique plutôt que d’un ensemble empirique des données.

Alors dans cette mise à jour en anglais – Time to come to the ad rem – j’ai étudié la corrélation entre ces nombres et le pourcentage de la consommation totale d’énergie provenant des sources renouvelables, respectivement pour l’UE, les États-Unis et la Chine. Encore une fois, surprise : des corrélations de Pearsonsolides comme des barres de fer. Comment est-ce que l’incidence d’un profil sémantique donné, dans un ensemble d’inventions, peut bien être corrélée avec la structure de consommation d’énergie à un niveau de r = 0,94 ? Allez savoir. Moi, ça continue de provoquer des démangeaisons chez mon singe curieux interne.

Je cherche dans la direction de consommation agrégée d’énergie renouvelable. Les calculs préliminaires, je les effectue avec les données publiées par la Banque Mondiale. Je prends donc les populations respectives de l’Union Européenne, des États-Unis et de la Chineet je les multiplie par le coefficient de consommation finale d’énergie par tête d’habitant. De cette façon j’obtiens la consommation agrégée d’énergie, en tonnes d’équivalent pétrole. Ensuite, je multiplie ça par le pourcentage de la consommation finale d’énergie dérivé des sources renouvelables. De tout en tout, j’atterris avec les données que vous pouvez trouver dans Tableau 2, ci-dessous.

 

Tableau 2

Année Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées en l’Union Européenne Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées aux États-Unis Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées en Chine continentale
2001 1 735 015 232 2 230 704 586 1 181 308 822
2002 1 732 427 984 2 255 943 576 1 260 951 639
2003 1 769 113 239 2 261 169 559 1 440 987 496
2004 1 787 505 277 2 307 767 983 1 643 595 354
2005 1 793 312 022 2 318 770 902 1 816 983 253
2006 1 800 278 875 2 296 824 886 1 986 422 995
2007 1 769 767 272 2 337 001 704 2 148 377 946
2008 1 762 246 130 2 277 080 529 2 216 020 807
2009 1 660 333 596 2 164 820 311 2 367 557 406
2010 1 725 188 226 2 215 223 615 2 614 842 137
2011 1 658 167 007 2 190 417 726 2 804 509 642
2012 1 645 249 820 2 156 975 857 2 910 970 303
2013 1 626 364 912 2 182 583 138 3 004 912 635
2014 1 564 974 842 2 216 186 625 3 051 503 511

 

Je corrèle. Je calcule le coefficient de corrélation de Pearson pour chaque paire des séries temporelles « Nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical du Tableau 1 ; Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées du Tableau 2 ». Union Européenne, corrélation r = -0,779703594 ; États-Unis r = -0,67424865 ; Chine r = 0,966634589. Me font ch**r, ces turbines, franchement. Elles mettent la tête à l’envers la plupart de ce que j’avais appris jusqu’alors en termes de méthodes de recherche empirique. Je veux dire que ces corrélations n’ont pas le droit d’exister. Elles sont définitivement trop significatives. Je veux les étudier pas à pas, et ce sera aussi une occasion rêvée pour jouer le prof en termes d’analyse quantitative.

Mon premier pas consiste à représenter chaque nombre comme une déviation de la moyenne arithmétique respective. Je sais, ça sonne sorcier, mais c’est simple comme tout. Vous pouvez faire de même avec tout ce qui est observable et mesurable : vous pouvez représenter chaque phénomène comme une déviation d’un état attendu. Notre cerveau le fait tout le temps, par ailleurs. Dans chaque série temporelle en question, je calcule sa moyenne arithmétique et ensuite je représente se nombre comme la différence (soustraction) entre ce nombre original et ladite moyenne. Vous pouvez trouver les résultats de cette opération dans Tableau 3, ci-dessous. Les valeurs entre parenthèses sont des négatives.

Tableau 3

  Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées – déviations de la moyenne Nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical – déviations de la moyenne
Année Union Européenne États-Unis Chine Union Européenne États-Unis Chine
2001 18 590 629,08 (12 971 913,79) (993 615 745,57) (617,71) (1 278,29) (2 114,64)
2002 16 003 381,53 12 267 076,21 (913 972 928,57) (634,71) (1 250,29) (2 005,64)
2003 52 688 636,34 17 493 059,21 (733 937 071,57) (588,71) (1 053,29) (1 838,64)
2004 71 080 674,76 64 091 483,21 (531 329 213,57) (427,71) (841,29) (1 522,64)
2005 76 887 419,60 75 094 402,21 (357 941 314,57) (412,71) (800,29) (1 436,64)
2006 83 854 272,45 53 148 386,21 (188 501 572,57) (296,71) (545,29) (930,64)
2007 53 342 669,61 93 325 204,21 (26 546 621,57) (273,71) (394,29) (639,64)
2008 45 821 527,04 33 404 029,21 41 096 239,43 (9,71) (90,29) (141,64)
2009 (56 091 006,47) (78 856 188,79) 192 632 838,43 211,29 268,71 13,36
2010 8 763 623,63 (28 452 884,79) 439 917 569,43 512,29 937,71 814,36
2011 (58 257 595,18) (53 258 773,79) 629 585 074,43 772,29 1 077,71 1 655,36
2012 (71 174 782,21) (86 700 642,79) 736 045 735,43 652,29 1 154,71 2 067,36
2013 (90 059 690,10) (61 093 361,79) 829 988 067,43 547,29 1 284,71 2 823,36
2014 (151 449 760,09) (27 489 874,79) 876 578 943,43 566,29 1 529,71 3 256,36
Moyenne 1 716 424 602,47 2 243 676 499,79 2 174 924 567,57 1 233,71 2 544,29 2 483,64

 

Les chiffres que vous pouvez voir dans Tableau 3 sont une première approche à la notion des moments de coïncidence. Je prends, par exemple, la paire des valeurs pour les États-Unis en 2006 : consommation des renouvelables 53 148 386,21 de tonnes au-dessus de la moyenne et les demandes de brevet pour les turbines éoliennes à l’axe vertical 545,29 au-dessous de la moyenne. Ce moment de coïncidence particulier est comme négatif : mes deux valeurs empiriques dévient de leurs moyennes respectives dans des directions opposées.

Oui, je sais : comment peut-on avoir 0,29 d’une demande de brevet ? Eh ben, si, on peut, puisqu’une moyenne est essentiellement une valeur non-existante en réalité, et si nous soustrayons quelque chose qui n’existe pas de quelque chose qui existe, des fractions d’évènements apparaissent. Normal, v’zallez vous habituer.

Je prends un autre moment, celui de 2006 en Chine. Consommation des renouvelables (188 501 572,57) de tonnes au-dessous de la moyenne et les demandes de brevet pour les turbines éoliennes à l’axe vertical (930,64) au-dessous de la moyenne : cette fois les deux déviations vont dans la même direction négative.

Nous avons donc un ensemble d’observations composé des moments de coïncidence. Nous pouvons poser deux sortes de questions. Premièrement, est-ce que ces moments que je viens de citer sont importants ou pas ? Vous savez, les coïncidences, y en a que nous ne remarquons même pas, comme tous ces électrons qui volent dans toutes les directions, et y en a qui pèsent, comme la rencontre accidentelle entre une voiture et un arbre. Est-ce qu’il y a, dans notre ensemble, des coïncidences plus importantes et moins importantes ? Deuxièmement, quelle est la cohérence et l’importance relative de tous ces moments de coïncidence observées dans Tableau 3 en comparaison à, par exemple, la coïncidence entre le fait qu’il pleut et celui que le trottoir soit mouillé ? Ce que je veux dire c’est que dans la science, nous commençons d’habitude avec un ensemble des coïncidences que nous essayons de comprendre en évaluant leur importance relative.

Mathématiquement, nous pouvons faire deux choses avec cet ensemble. D’une part, nous pouvons standardiser ces moments de coïncidence pour les rendre mutuellement comparables, et ensuite nous pouvons calculer, pour chaque moment standardisé, le coefficient économique d’élasticité : déviation relative dans variable A divisée par la déviation relative dans variable B. D’autre part, nous pouvons suivre le chemin typiquement statistique et calculer le coefficient de corrélation.

On y va mollo et on commence par le premier chemin, donc celui de standardisation et d’élasticité. Je standardise mes déviations avec les moyennes respectives de chaque série temporelle et donc je divise chaque déviation dans la colonne « Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées en l’Union Européenne » par la moyenne de cette valeur etc. Ce type de standardisation s’appelle « dénomination », pour être exact, puisque je standardise en transformant mes valeurs en des fractions à dénominateur commun. Vous pouvez voir les résultats de cette standardisation par dénomination dans Tableau 4, ci-dessous.

 

Tableau 4

  Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées – déviations de la moyenne divisées par la moyenne Nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical – déviations de la moyenne divisées par la moyenne
Année Union Européenne États-Unis Chine Union Européenne États-Unis Chine
2001  0,01  (0,01)  (0,46)  (0,50)  (0,50)  (0,85)
2002  0,01  0,01  (0,42)  (0,51)  (0,49)  (0,81)
2003  0,03  0,01  (0,34)  (0,48)  (0,41)  (0,74)
2004  0,04  0,03  (0,24)  (0,35)  (0,33)  (0,61)
2005  0,04  0,03  (0,16)  (0,33)  (0,31)  (0,58)
2006  0,05  0,02  (0,09)  (0,24)  (0,21)  (0,37)
2007  0,03  0,04  (0,01)  (0,22)  (0,15)  (0,26)
2008  0,03  0,01  0,02  (0,01)  (0,04)  (0,06)
2009  (0,03)  (0,04)  0,09  0,17  0,11  0,01
2010  0,01  (0,01)  0,20  0,42  0,37  0,33
2011  (0,03)  (0,02)  0,29  0,63  0,42  0,67
2012  (0,04)  (0,04)  0,34  0,53  0,45  0,83
2013  (0,05)  (0,03)  0,38  0,44  0,50  1,14
2014  (0,09)  (0,01)  0,40  0,46  0,60  1,31

 

Les valeurs standardisées nous donnent comme une meilleure idée de ces moments de coïncidence. Nous commençons à distinguer entre des coïncidences poids lourd – 2010 en Chine – et celles qui en sont au poids coq (2008 aux États-Unis). Maintenant, je vais un pas plus loin dans la standardisation : pour chaque moment de coïncidence je calcule le coefficient de la déviation relative en la consommation des renouvelables divisée par la déviation relative correspondante en nombre des demandes de brevet. Je dénomme le degré du pas commun en énergie en des unités du pas commun en inventions. Bien sûr, « déviation relative » veut dire que j’utilise les valeurs du Tableau 4. Je fais donc ce que les économistes appellent « calcul d’élasticité » : comment est-ce que la consommation des renouvelables dévie de sa moyenne en la présence d’une unité de déviation en nombre des demandes de brevet.  Vous pouvez retrouver ces élasticités dans Tableau 5, ci-dessous.

 

Tableau 5

  Élasticité locale des déviations en la consommation des renouvelables par rapport aux déviations locales en nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical 
Année Union Européenne États-Unis Chine
2001 (0,02) 0,01 0,54
2002 (0,02) (0,01) 0,52
2003 (0,06) (0,02) 0,46
2004 (0,12) (0,09) 0,40
2005 (0,13) (0,11) 0,28
2006 (0,20) (0,11) 0,23
2007 (0,14) (0,27) 0,05
2008 (3,39) (0,42) (0,33)
2009 (0,19) (0,33) 16,47
2010 0,01 (0,03) 0,62
2011 (0,05) (0,06) 0,43
2012 (0,08) (0,09) 0,41
2013 (0,12) (0,05) 0,34
2014 (0,19) (0,02) 0,31

 A partir du moment que j’ai ces élasticités, il y a des choses que je peux faire avec et des choses que je ne peux pas faire. Le premier truc que je peux faire c’est observer la distribution de ces élasticités dans le temps, l’histoire de voir à quel point elles restent dociles et prévisibles. Dans ce cas précis, c’est plutôt le cas ; avec l’exception de deux épisodes – Union Européenne en 2008 et Chine en 2009 – ces coefficients d’élasticité se composent en des séries très récurrentes. Une telle prévisibilité d’élasticités locales est déjà une bonne prédiction de la corrélation strictement dite.

Une bonne prédiction de corrélation n’est pas tout à fait le même truc que la corrélation per se. La différence réside dans la généralité. Je vous invite à faire une petite expérience avec les données du tableau 3 : répétez la même séquence analytique que moi j’avais faite, seulement standardisez ces déviations du Tableau 4 avec le maximum des deux catégories. Divisez donc chaque déviation en la consommation des renouvelables par la plus grande déviation dans cette catégorie en général, toutes régions géographiques confondues. Ensuite, faites de même pour les déviations en nombre des demandes de brevet. Vous verrez que les déviations standardisées et les élasticités seront significativement différentes des celles que je viens de présenter, quoi que les coïncidences locales ainsi exprimées formeront un modèle général similaire.

Conclusion : la méthode de standardisation par dénomination est intéressante pour capter des régularités à l’intérieur d’un ensemble d’observations empiriques mais elle est très sensible au choix du dénominateur, et, de ce fait, elle rend difficile la comparaison entre des recherches différentes menées par des chercheurs indépendants.

Alors moi, maintenant, je vais être un chercheur indépendant par rapport à moi-même. Je repars du début. Lorsque je vois une coïncidence, cela veut dire que deux choses changent en même temps. Dans ce changement coïncidentel, il y a deux niveaux. Les choses changent ensemble et chacune d’elles change à part, sous l’influence de quelques facteurs autres que cette coïncidence précise. Pour chaque moment de coïncidence dans Tableau 3, je fais donc deux calculs différents. D’une part, je multiplie la déviation absolue en la consommation des renouvelables par la déviation correspondante, la même année, en nombre des demandes de brevet. Ensuite, je tire la moyenne arithmétique des tous ces produits locaux (momentanés) : c’est la covariancede mes deux variables.

Je sais que dans cette covariance, il y a la composante des changements autonomes qui se cache. Pour chacune des séries temporelles je fais donc le suivant : j’élève au carré chaque déviation du Tableau 3 (pour se débarrasser des minus), je tire la moyenne arithmétique de ces carrés et dans un dernier pas je tire la racine carrée de cette moyenne. De cette façon j’obtiens la déviation standard de chaque série temporelle. A partir de là, je standardise (je divise) chaque covariance par le produit des déviations standard des séries temporelles correspondantes.

Compliqué ? Bon, je répète par petits bouts.

 Pas no. 1 : Covariance

 Déviation(Énergie renouvelable ; 2006)

*

Déviation (Demandes de brevet ; 2006)

= Covariance locale pour 2006

 Je fais de même pour chaque année. Dans ce cas précis, j’ai ainsi 14 covariances locales pour chacune des trois régions géographiques. Les voici dans Tableau 6 ci-dessous :

Tableau 6

  Covariances locales entre la consommation des renouvelables et le nombre des demandes de brevet
Année Union Européenne États-Unis Chine
2001 (11 483 697 161,28) 16 581 812 079,22 2 101 142 439 117,30
2002 (10 157 574 876,85) (15 337 350 146,78) 1 833 103 275 811,23
2003 (31 018 552 909,01) (18 425 189 369,56) 1 349 448 154 237,15
2004 (30 402 220 035,00) (53 919 249 235,56) 809 024 631 835,87
2005 (31 732 536 462,11) (60 096 977 314,92) 514 233 832 855,37
2006 (24 880 760 555,28) (28 981 055 739,99) 175 427 642 073,80
2007 (14 600 650 710,47) (36 796 794 804,49) 16 980 356 869,44
2008 (445 123 405,55) (3 015 906 637,63) (5 820 988 770,49)
2009 (11 851 228 367,01) (21 189 784 443,70) 2 573 024 341,87
2010 4 489 479 191,39 (26 680 676 533,35) 358 250 014 932,51
2011 (44 991 508 506,18) (57 397 741 348,49) 1 042 188 149 991,58
2012 (46 426 293 654,75) (100 114 470 805,28) 1 521 669 408 607,80
2013 (49 288 381 825,37) (78 487 514 648,42) 2 343 352 738 660,65
2014 (85 763 835 570,70) (42 051 654 172,20) 2 854 454 103 711,79
Covariance générale (moyenne) (27 753 777 489,15) (37 565 182 365,80) 1 065 430 484 591,13

Remarquez que les covariances locales en l’Union Européenne et les États-Unis sont généralement négatives, pendant qu’en Chine elles sont généralement positive. Ceci se reflète dans les covariances générales, qui sont les moyennes arithmétiques de leurs colonnes respectives.

 Pas no. 2 : Les déviations standard

{[Déviation (Énergie renouvelable ; 2006)]2}1/2

etc.

Je répète cette opération apparemment aberrante – tirer la racine carrée d’une puissance carrée – pour chaque déviation locale. J’obtiens un tableau des déviations locales standardisées de cette façon spécifique : Tableau 7 ci-dessous. Notez que cette fois la standardisation n’était pas une dénomination. Il n’était pas question de dénominateur commun. En revanche, cette standardisation particulière m’a permis de calculer chaque déviation comme un module de distance de la moyenne ; les chiffres dans Tableau 7 sont presque les mêmes que ceux dans Tableau 3, juste sans les minus. Je tire la moyenne de chaque colonne et j’ai ainsi les distances moyennes des moyennes respectives, donc les déviations standard.

Tableau 7

  Tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées – déviations locales standardisées comme racines carrés des puissances carrées Nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical – déviations locales standardisées comme racines carrés des puissances carrées
Année Union Européenne États-Unis Chine Union Européenne États-Unis Chine
2001  18 590 629,08  12 971 913,79  993 615 745,57  617,71  1 278,29  2 114,64
2002  16 003 381,53  12 267 076,21  913 972 928,57  634,71  1 250,29  2 005,64
2003  52 688 636,34  17 493 059,21  733 937 071,57  588,71  1 053,29  1 838,64
2004  71 080 674,76  64 091 483,21  531 329 213,57  427,71  841,29  1 522,64
2005  76 887 419,60  75 094 402,21  357 941 314,57  412,71  800,29  1 436,64
2006  83 854 272,45  53 148 386,21  188 501 572,57  296,71  545,29  930,64
2007  53 342 669,61  93 325 204,21  26 546 621,57  273,71  394,29  639,64
2008  45 821 527,04  33 404 029,21  41 096 239,43  9,71  90,29  141,64
2009  56 091 006,47  78 856 188,79  192 632 838,43  211,29  268,71  13,36
2010  8 763 623,63  28 452 884,79  439 917 569,43  512,29  937,71  814,36
2011  58 257 595,18  53 258 773,79  629 585 074,43  772,29  1 077,71  1 655,36
2012  71 174 782,21  86 700 642,79  736 045 735,43  652,29  1 154,71  2 067,36
2013  90 059 690,10  61 093 361,79  829 988 067,43  547,29  1 284,71  2 823,36
2014  151 449 760,09  27 489 874,79  876 578 943,43  566,29  1 529,71  3 256,36
Déviation standard (moyenne) 70 228 768,13 56 626 139,75 623 107 877,55 506,85 983,89 1 768,88

 

Pas no. 3 : Les corrélations Pearson entre les tonnes d’équivalent pétrole d’énergie renouvelable consommées et le nombre des demandes de brevet relatives aux turbines éoliennes à l’axe vertical

 Je standardise encore une fois et cette fois, c’est encore de la dénomination. Je standardise chaque covariance générale en la mettant au-dessus d’un dénominateur complexe fait par la multiplication des déviations standard des variables covariantes. Notez que ça marche uniquement au niveau de la covariance générale et des déviations standard. Si vous faites le même truc au niveau des observations locales (chaque année séparément), donc si vous divisez la covariance locale en l’année X par le produit des déviations locales, standardisées comme en Pas no. 2, vous obtiendrez à chaque fois un coefficient égal à 1 ou bien à -1, ce qui ne vous avance pas vraiment en termes de recherche quantitative. Cela veut dire que la covariance locale explique toujours à 100% les variances locales combinées.

Nous faisons donc cette opération sur les valeurs générales et la voici pour chacune région géographique en question :

 Union Européenne<=> Covariance générale (Énergie et Demandes de Brevet) / [(Déviation standard Énergie) * (Déviation standard Demandes de Brevet)] = – 27 753 777 489,15 / (70 228 768,13 * 506,85)– 0,78

États-Unis <=> Covariance générale (Énergie et Demandes de Brevet) / [(Déviation standard Énergie) * (Déviation standard Demandes de Brevet)] =- 37 565 182 365,80 / (56 626 139,75 * 983,89) =  – 0,67                                             

 Chine <=> Covariance générale (Énergie et Demandes de Brevet) / [(Déviation standard Énergie) * (Déviation standard Demandes de Brevet)] = 1 065 430 484 591,13 / (623 107 877,55 * 1 768,88 = 0,97    

Maintenant, j’interprète. Le coefficient de corrélation de Pearson prend des valeurs à partir de -1 jusqu’à 1. On assume, un peu par une coutume statistique, que le coefficient entre – 0,3 et 0,3 n’est pas vraiment significatif, donc qu’il n’y a pas de corrélation véritable.

 Si la corrélation Pearson pour l’Union Européenne est de r = – 0,78, cela veut dire que la covariance générale explique 78% des déviations standard combinées et que la relation fonctionnelle est négative : plus de consommation des renouvelables est accompagnée d’un moins en termes de demandes de brevet et vice versa. On a le même type négatif dans le cas des États-Unis, mais en Chine c’est une relation fonctionnelle

 Ouff ! J’ai fini de faire le prof avec cette analyse de corrélation. Je viens de me rappeler que cette exposition avait aussi pour but de m’expliquer quelque chose à moi-même, c’est-à-dire d’où peut bien venir la force extraordinaire de ces corrélations. Je me suis avancé juste un peu, mais c’est toujours mieux que rien. La partie la plus informative de cette analyse pas par pas semble être le Tableau 5, donc celui avec les élasticités locales. En économie, les élasticités, ça compte vraiment lorsque ça s’approche de 1 ou dépasse 1. Dans le cas de l’Union Européenne, une élasticité de ce rang était observable en 2008, avec une montée en valeur depuis 2004. Aux États-Unis il y a quelque chose de similaire entre 2004 et 2009, seulement comme moins prononcé. En revanche, en Chine, ces élasticités sont toujours plutôt fortes, avec un envol en 2009.

Dans l’Union Européenne et aux États-Unis, la période entre 2004 et 2009 c’est précisément l’envol du nombre des demandes de brevet pour les turbines éoliennes à l’axe vertical. Visiblement, l’envol simultané de la consommation des renouvelables était encore plus fort. Durant cette période 2004 – 2009, quelque chose de spécial est arrivé au marché d’énergies renouvelables en général. Quant à la Chine, la direction positive de la corrélation n’est pas sorcière : elle avait été pompée par trois facteurs simultanés, donc la croissance démographique, croissance en la consommation d’énergie par tête d’habitant et la croissance en nombre d’inventions. Encore, je reste sidéré par la forte signification de cette corrélation et je n’ai pas encore trouvé d’explication satisfaisante.

Je continue à vous fournir de la bonne science, presque neuve, juste un peu cabossée dans le processus de conception. Je vous rappelle que vous pouvez télécharger le business plan du projet BeFund(aussi accessible en version anglaise). Vous pouvez aussi télécharger mon livre intitulé “Capitalism and Political Power”. Je veux utiliser le financement participatif pour me donner une assise financière dans cet effort. Vous pouvez soutenir financièrement ma recherche, selon votre meilleur jugement, à travers mon compte PayPal. Vous pouvez aussi vous enregistrer comme mon patron sur mon compte Patreon. Si vous en faites ainsi, je vous serai reconnaissant pour m’indiquer deux trucs importants : quel genre de récompense attendez-vous en échange du patronage et quelles étapes souhaitiez-vous voir dans mon travail ?

 

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Ma petite turbine éolienne à l’axe vertical

Voilà qu’arrive ce qui a dû arriver. Lorsque je me plonge dans les faits, je ne le fais jamais impunément. Une fois que je prends du goût dans l’observation de réalité telle qu’elle est, ça devient presque une obsession. Ainsi donc, dans mes deux mises à jour précédentes, j’avais tourné autour de cette hypothèse que « Les technologies d’exploitation des sources renouvelables d’énergie sont dans leur phase de banalisation, avec une adaptation de plus en plus poussée et réciproque entre lesdites technologies et les structures sociales qui les absorbent » (consultez Ça me démange, carrémentainsi que Good hypotheses are simple) Eh ben, ça m’a accroché. J’ai voulu voir d’un peu plus près ce que ça pourrait bien vouloir dire dans la vie réelle. J’ai donc pioché un peu dans les demandes de brevet, déposées à l’Office Européen des Brevets, et j’ai déniché cette invention intéressante – une turbine éolienne en forme d’une chaîne d’ADN, soumise par un groupe d’inventeurs Slovaques : Marcela Morvová, Vladimír Chudoba, Lubomír Stano, Andera Zilková et Michal Amena. Si vous cliquez sur ce long lien hypertexte, vous verrez par vous-mêmes : une petite merveille.

Ladite petite merveille appartient à la famille des turbines à l’axe vertical. C’est une technologie relativement jeunotte. Le gros de l’énergétique éolienne est basé sur les turbines à l’axe horizontal, qui, à leur tour, sont des versions plus ou moins Tech du bon vieux moulin à vent Hollandais : une p***in de grosse hélice, à grand rendement, positionnée à la verticale. Remarquez : dans les axes horizontaux, il y a du changement aussi. Il y a une famille des turbines qui marchent comme l’hélice d’un bateau, à une échelle beaucoup plus petite. Les turbines commercialisées par Semtiveen sont un bon exemple.

La turbine dont je parle maintenant, en revanche, demande de brevet no. EP 3 214 303 A1, c’est du relativement petit. La surface opérationnelle dont elle a besoin est d’à peine 5 m; on peut la monter dans un rectangle de 2,24 mètres de côté. Le truc qui intrigue, au sujet de ces turbines éoliennes à l’axe vertical est qu’il est très difficile de déterminer à coup sur leur capacité énergétique. Vous pouvez trouver une bonne revue de littérature à ce sujet chez Bhutta et al.(2012[1]) et une description tout aussi intéressante d’une expérience empirique dans le tunnel aérodynamique chez Howell et al.(2010[2]) et moi, je vais faire de mon mieux pour vous expliquer les trucs de base.

Alors la base, elle est faite de la formule suivante : PW = ½ * Cp* p * A * v3. « PW » c’est la capacité énergétique en question (juste l’histoire de montrer la parenté avec l’anglais ‘power’), « v » c’est la vitesse du vent, « A » représente la superficie totale du rotor (hélice), « p » symbolise la densité de l’air (p = 1.225kg/m3), et enfin « Cp » est le coefficient de capacité, ou, si vous voulez, d’efficacité énergétique. Cette équation est par ailleurs un bon prétexte pour faire un peu prof, de ma part, et de montrer la distinction entre les facteurs exogènes et endogènes d’une technologie. Ici, les facteurs exogènes, c’est la vitesse du vent et la densité de l’air. Cette dernière est constante, donc en terme des forces externes on a « ½ * p * v3 = 0,6125* v3».

Dans ma belle ville de Krakow (Pologne) la vitesse du vent aujourd’hui est d’à peu près 20 km/h = 20 * 0,277777778 m/s = 5,55555556 m/set c’est une brise agréable. Élevée à la puissance trois et multipliée par 0,6125, cette brise donne une capacité exogène de 105,0240057 kW. Ça, c’est ce que la mère Nature nous donne. Ma petite turbine peut faire un usage plus ou moins efficace de ce don, suivant la surface totale Ade l’hélice et l’efficacité énergétique Cp. Cette dernière peut varier, selon Bhutta et al.(2012[3]) entre 59% et 72%, quoi que ça change énormément suivant la technologie exacte. Même des trucs bêtes, comme la rugosité du matériel dont est faite l’hélice, jouent un rôle différent suivant la vitesse du vent. D’autre part, vu la vague montante d’innovation dans le domaine (consultez Ça me démange, carrément) j’assume que ça progresse, ces derniers temps. Je vais être conservatif et prendre une efficacité moyenne entre 59% et 72%, soit Cp= 65,5%. Le prototype de cette turbine no. EP 3 214 303 A1offre une superficie active de l’hélice égale à A = 1,334 m2et ça me donne, de tout en tout, PW = 1,334 *65,5% * 105,0240057 = 91,76682549 kW.

Ça a l’air prometteur. Suivant les données sur la consommation d’énergie, moi, comme Polonais moyen statistique, j’ai besoin de 0,56 kW, en moyenne, à mon usage personnel, pour mener la vie que je mène. Si je ne me suis pas gouré dans les calculs, avec une brise agréable de 20 kilomètres – heure, ce machin génère une capacité suffisante pour plus de 180 Polonais moyens statistiques comme moi. Je vérifie la probabilité d’avoir une brise comme ça sur toute l’année et là, je vois le premier problème. La vitesse du vent à laquelle cette turbine commence à produire de l’énergie utile est de v = 1,9 m/set c’est la vitesse moyenne du vent à Krakow sur les 12 derniers mois. Les jours de vent au-delà de v = 1,9 m/sc’est surtout le printemps et l’été ou, en d’autres termes, ma turbine aurait une chance quelconque de produire de l’énergie durant à peu de choses près la moitié de l’année. Sur le mois dernier, la vitesse moyenne était de v = 2,36 m/s et ça donne PW = 1,334 *65,5% * 0,6125 * 2,363= 7,034597146 kW, soit entre 13 et 14 Polonais statistiques moyens.

C’est moins optimiste mais plus réaliste, en même temps. Lorsque je traduis ces nombres en des faits de la vie quotidienne, j’ai la vision d’une petite communauté locale qui durant la saison venteuse de l’année peut satisfaire sa demande ménagère d’énergie avec un système des turbines éoliennes de taille tout aussi ménagère.

Ma ville, Krakow, ce n’est pas vraiment la capitale du vent. L’endroit est un réseau des vallées post-glaciales tortueuses, avec juste quelques plaines un peu plus spacieuses et l’ironie du sort veut que ces plaines soient placées surtout dans des endroits à risque élevé d’inondation. En revanche, toute la Pologne centrale et septentrionale, ça change énormément. La côte de la Baltique, par exemple, c’est une vitesse moyenne du vent égale à v = 12,9 m/set ça donne PW = 1,334 *65,5% * 0,6125 * 12,93= 1148,873874 kW.Plus d’un mégawatt, suffisant pour plus de deux milles Polonais statistiques moyens. Eh ben, dites donc, placée au bon endroit, cette petite turbine éolienne est un vrai ouragan !

Bon, je crois que je la vois venir, cette absorption de technologie. Avec la vague montante d’innovation, cela veut dire une impulsion puissante de développement pour les régions les plus favorisées en termes de conditions naturelles. Les régions côtières et les grandes plaines sont naturellement favorisées en ce qui concerne l’éolien. La banalisation des technologies d’énergétique renouvelable peut provoquer un changement profond de la géographie d’habitat humain. Des endroits typiquement ruraux en Europe peuvent soudainement devenir attrayants pour créer des villes.

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[1]Muhammad Mahmood Aslam Bhutta, Nasir Hayat, Ahmed Uzair Farooq, Zain Ali, Sh. Rehan Jamil, Zahid Hussain (2012) Vertical axis wind turbine – A review of various configurations and design techniques, Renewable and Sustainable Energy Reviews 16 (2012) 1926–1939

[2]Howell, R., Qin, N., Edwards, J., Durrani, N. (2010) Wind tunnel and numerical study of a small vertical axis wind turbine, Renewable Energy, 35 (2), pp. 412- 422

[3]Muhammad Mahmood Aslam Bhutta, Nasir Hayat, Ahmed Uzair Farooq, Zain Ali, Sh. Rehan Jamil, Zahid Hussain (2012) Vertical axis wind turbine – A review of various configurations and design techniques, Renewable and Sustainable Energy Reviews 16 (2012) 1926–1939

Ça me démange, carrément

Ces derniers jours, je me suis rendu compte qu’à part ce blog et ces business plans dont la préparation je documente ici, il faut que j’écrive quelque chose de scientifique. Il faut que je pose une hypothèse de nature générale et une méthode de recherche pour la vérifier. Je passe donc en revue les différentes idées qui sont venues dans ma tête durant les 6 – 8 derniers mois. J’ai beaucoup travaillé sur des business plans, donc logiquement le développement scientifique correspondant devrait s’en tenir plutôt à la microéconomie et/ou à la gestion. Vu la direction courante de ces business plans que je prépare, le marché de l’énergie – en combinaison avec les solutions FinTech – semble être le champ empirique privilégié pour cette science que je suis censé présenter.

J’avais découvert, il y a déjà quelque temps, que je suis plutôt empiriste que rationaliste dans ma méthode scientifique. Je regarde autour de moi, je renifle, je tâtonne s’il le faut, et je me fais une idée de ce que j’observe. Petit à petit, je peaufine cette idée jusqu’à ce qu’elle devienne une hypothèse. Une fois ma petite hypothèse en place, je retourne vers la réalité empirique, seulement cette fois de manière plus respectable : je catégorise et je mesure. J’essaie de voir des régularités quantifiables et je reformule mon hypothèse par référence à ces régularités. J’essaie de voir si je peux avancer une hypothèse intelligible que je puisse ensuite accompagner d’une preuve empirique.

Je réassume les observations empiriques que j’ai faites durant ces derniers mois, surtout en ce qui concerne les énergies renouvelables et le FinTech. Tout d’abord, je peux observer comme une vague technologique de miniaturisation dans le secteur des énergies renouvelables. Les moulins à vent, les turbines hydrauliques, même les centrales électriques solaires à chaleur solaire concentrée : tout ce bazar se rétrécit en termes de la taille des formes utilitaires. L’énergétique renouvelable est en train de se démocratiser en termes de taille et de s’adapter à une géographie dispersée. En parallèle à la miniaturisation, une maximisation a lieu, aussi paradoxal que ça puisse paraître. Je suis régulièrement les nouveautés technologiques dans le domaine des énergies renouvelables, par exemple avec https://www.techinsider.com, et je peux remarquer une vague des projets de taille gargantuesque. Dans l’éolien, par exemple, en parallèle au lancement des turbines de taille d’une machine à laver il y a ces turbines géantes que les Ecossais installent en mer.

Lorsqu’une technologie commence à prendre des formes utilitaires de plus en plus variées, cela veut dire son adaptation à la structure sociale, en d’autres mots sa banalisation. C’est une phase cruciale de changement technologique, car l’adaptation devient réciproque : à mesure que la technologie donnée prend des formes de mieux en mieux adaptées aux contextes locaux spécifiques, lesdits contextes changent de forme pour absorber cette technologie de plus en plus vite et avec de plus en plus d’aise. Alors voilà une jolie hypothèse : « Les technologies d’exploitation des sources renouvelables d’énergie sont dans leur phase de banalisation, avec une adaptation de plus en plus poussée et réciproque entre lesdites technologies et les structures sociales qui les absorbent ».

L’hypothèse, elle a beau être jolie, mais ce qu’il me faut c’est ce qu’elle soit empiriquement vérifiable. Sans cet attribut de preuve empirique possible, une hypothèse reste spéculative et selon Milton Friedman, les hypothèses spéculatives, y en a tout un tas et on ne sait pas vraiment quoi en faire. Il se fait que j’ai de l’expérience dans l’étude quantitative des brevets ainsi que des demandes de brevet. Une demande de brevet témoigne qu’un certain effort de recherche et développement avait été mis dans une invention qui, à son tour, est suffisamment originale pour être reconnue comme une nouveauté et pour avoir des chances de devenir une invention brevetée. Le nombre des demandes de brevet en un endroit et temps donné, ainsi que dans un champ spécifique de recherche et développement reflète l’effort relatif.

En revanche, un brevet assigné à une invention témoigne d’une originalité ainsi que d’une priorité temporelle suffisante pour que l’invention donnée reçoive la protection légale en des termes de propriété intellectuelle. Le nombre de brevets octroyés en un endroit et temps donné, dans un champ spécifique de recherche, est une mesure de la quantité des technologies nouvelles et originales à être mises en utilisation.

J’ai bénéficié des bienfaits de ce moteur de recherche de Google – https://patents.google.com– pour se faire une idée empirique de ce processus de banalisation des technologies. J’avais pioché aussi bien les demandes de brevets que les brevets eux-mêmes dans quatre domaines technologiques des énergies renouvelables : l’éolien, l’hydraulique, le photovoltaïque et enfin l’énergie solaire concentrée. Je rappelle que cette dernière c’est le truc des gros miroirs paraboliques qui absorbent la chaleur du soleil et la transforment en chaleur industrielle (vapeur), qui, à son tour, travaille ensuite normalement comme dans une centrale électrique thermique, en propulsant une turbine électrique.

Je me suis concentré sur trois offices des brevets importants dans le monde : l’Office Européen des Brevets (OEB), The US Patent and Trademark Office (USPTO) aux États-Unis, et l’office des brevets de la République Populaire Chinoise (OBC). Voilà le lien hypertexte au fichier Excel avec les résultats de cette excursion empirique. Je sais que certains systèmes, sur des ordinateurs personnels, ont des préjugés en ce qui concerne les fichiers Excel et peuvent bloquer leur affichage ou téléchargement. Pour ceux parmi vous, mes chers lecteurs, dont les systèmes personnels témoignent de cette aversion particulière, je reproduis les tableaux de ce fichier plus loin, en-dessous du texte.

Voilà donc que je peux confronter mon hypothèse avec des faits quantifiables. Je fais une assomption additionnelle : si une banalisation des technologies d’énergétique renouvelable est effectivement en train de survenir, elle est liée à un effort d’innovation. Si une nouvelle variété de turbine hydraulique, par exemple, est prête à être commercialisée, elle va se démarquer, par des détails significatifs, des technologies précédentes. Toutes les innovations dans le domaine ne seront pas forcément soumises aux procédures de brevet, néanmoins un changement substantiel dans le nombre d’inventions qui y sont soumises est une mesure dudit effort d’innovation. La banalisation d’un domaine donné de technologie devrait donc être associée à un nombre accru d’inventions brevetées.

Dans l’éolien, un tel changement est visible et – ce qui est intéressant – il est visible plus au niveau des brevets octroyés qu’au niveau des demandes nouvelles de brevet. On peut voir comme une vague technologique qui continue à monter. C’est tout comme si, ces dernières années, un certain nombre des procédures de brevet ait passé dans la phase de « secouer les rênes » et de mise en exploitation accélérée. Je profite déjà de cette première observation pour attirer votre attention à une différence intéressante entre l’Europe et les États-Unis d’une part et la Chine d’autre part. En Europe et aux États-Unis il y a normalement plus de demandes de brevet que des brevets octroyés : la procédure de brevetage fonctionne comme un tri. Les inventions soumises à la procédure sont sélectionnées et certaines de parmi elles sont éliminées ou bien s’enlisent dans des longs procès légaux en ce qui concerne leur priorité.

En Chine, vous pouvez observer l’inverse : normalement il y plus des brevets octroyés que des demandes déposées. Honnêtement, j’ai un savoir des plus superficiels sur le fonctionnement du système légal chinois et dans ce que je vais avancer je m’appuie sur des cas occasionnels que j’avais étudiés. Apparemment, en Chine, une demande de brevet conduit fréquemment au sciage de l’invention soumise à ladite demande en tout un ensemble des brevets différents. Fréquemment, c’est même une stratégie délibérée de la part d’entités qui sollicitent la protection légale de leurs inventions.

Dans le photovoltaïque, nous pouvons observer quelque chose de similaire à l’éolien : une vague montante des brevets, quoi que dans ce cas, cette vague semble avoir reculé un peu en 2017. Par contre, dans le solaire concentré, je vois une vague d’innovation qui continue à gagner en hauteur. C’est par ailleurs bien ce que je pressentais dans mes os depuis un certain temps : le photovoltaïque s’est un peu essoufflé en termes de changement technologique, pendant que le solaire concentré ne fait que commencer à valser.

Comme je jette un coup d’œil sur l’hydroélectricitéje vois quelque chose de similaire, donc une vague montante de brevets octroyés, mais je vois aussi une autre disparité géographique. L’Europe est systématiquement en recul derrière les États-Unis et la Chine en termes d’intensité de changement technologique dans tous les quatre domaines étudiés ici, mais en termes d’hydroélectricité, ce n’est plus du recul : c’est carrément une capitulation. Ça me révolte quoi que ça ne m’étonne que moyennement. Ça me révolte parce que l’énergie hydraulique, côte à côte avec l’éolien, c’est pratiquement ce qui eût bâti la civilisation européenne entre le 11èmeet le 19èmesiècle. Nous avons, sur ce petit continent montagneux, un réseau fluvial des plus favorables et ça avait été aussi un facteur puissant de succès développemental de la civilisation européenne. Voir tout ce potentiel tellement inexploité en termes d’énergie, ça me démange, carrément.

Tout en étant révolté, je ne suis que moyennement étonné. J’ai déjà rencontré plusieurs opinions critiques quant au développement de l’hydroélectrique en Europe. D’une part, l’exploitation des rivières, au moins pour l’exploitation des turbines hydrauliques, semble être définitivement sur-régulée. Où que nous posions le pied, au bord d’une rivière, il y a des terrains exclus d’exploitation pour des raisons environnementales. J’adore les canards sauvages, mais je déteste cette espèce d’êtres humains sauvages qui excluent d’avance tout compromis entre un gîte des canards et une turbine hydraulique locale.

En plus, le secteur d’énergie en Europe est extrêmement concentré. En dépit de toute la libéralisation de ces trois dernières décennies, nous vivons toujours dans un oligopole poussé et les oligopoles, ça ne favorise pas la banalisation des technologies.

Bon, fini de penser science, pour aujourd’hui. Je continue à vous fournir de la bonne science, presque neuve, juste un peu cabossée dans le processus de conception. Je vous rappelle que vous pouvez télécharger le business plan du projet BeFund(aussi accessible en version anglaise). Vous pouvez aussi télécharger mon livre intitulé “Capitalism and Political Power”. Je veux utiliser le financement participatif pour me donner une assise financière dans cet effort. Vous pouvez soutenir financièrement ma recherche, selon votre meilleur jugement, à travers mon compte PayPal. Vous pouvez aussi vous enregistrer comme mon patron sur mon compte Patreon. Si vous en faites ainsi, je vous serai reconnaissant pour m’indiquer deux trucs importants : quel genre de récompense attendez-vous en échange du patronage et quelles étapes souhaitiez-vous voir dans mon travail ?

Tableau 1 – Brevets octroyés et demandes de brevets dans les technologies éoliennes

Année OEB brevets octroyés OEB demandes de brevet déposées USPTO brevets octroyés USPTO demandes de brevet déposées Chine OBC brevets octroyés Chine OBC demandes de brevet déposées
2001 374 1486 2191 3285 2235 1267
2002 550 1585 2323 3381 2386 1768
2003 758 1716 2324 3731 2720 2392
2004 763 1980 2342 4189 3300 3218
2005 722 1969 2138 4499 3673 4076
2006 901 2126 2497 5071 4824 5623
2007 804 2399 2509 5606 6696 6744
2008 857 2749 2481 6229 8640 8787
2009 764 3182 2660 6992 11478 10937
2010 1008 3749 3648 8220 15652 13295
2011 1192 4464 4398 9225 20661 17906
2012 1391 4479 5389 9488 27254 22090
2013 1666 4260 6051 9774 33328 26225
2014 1659 4643 7194 10078 35338 31693
2015 2099 4395 7375 9993 48821 40055
2016 3048 2734 7813 8355 56485 45724
2017 3273 814 8988 4957 62516 41857

 

Tableau 2 – Brevets octroyés et demandes de brevets dans les technologies hydroélectriques

Année OEB brevets octroyés OEB demandes de brevet déposées USPTO brevets octroyés USPTO demandes de brevet déposées Chine OBC brevets octroyés Chine OBC demandes de brevet déposées
2001 21 73 91 161 249 172
2002 19 72 81 159 259 191
2003 38 81 102 221 331 295
2004 35 122 111 224 344 363
2005 21 110 107 254 411 446
2006 40 125 108 333 462 614
2007 20 150 106 451 735 751
2008 41 221 146 569 966 1041
2009 29 241 127 707 1269 1314
2010 55 331 243 652 1836 1437
2011 48 377 327 774 2396 1948
2012 69 394 348 618 2977 2589
2013 86 365 421 643 3541 3001
2014 85 343 521 592 3727 3246
2015 144 349 498 465 5656 4057
2016 197 186 482 304 5890 4870
2017 207 69 603 2 6229 4280

 

Tableau 3 – Brevets octroyés et demandes de brevets dans les technologies photovoltaïques

Année OEB brevets octroyés OEB demandes de brevet déposées USPTO brevets octroyés USPTO demandes de brevet déposées Chine OBC brevets octroyés Chine OBC demandes de brevet déposées
2001 541 2214 3000 4704 1099 1280
2002 752 2263 3062 4972 1413 1770
2003 1010 2469 3219 5489 1831 2540
2004 1015 2834 3256 6421 2149 3177
2005 892 3427 2973 7086 2519 4099
2006 1137 3936 3554 8314 3139 5499
2007 988 4359 3496 9144 4661 7424
2008 1111 5063 3620 10342 6347 9235
2009 1043 6022 4089 12082 9001 12890
2010 1365 6856 5882 14541 13550 17161
2011 1587 7135 6804 16800 20681 21771
2012 1836 6872 8637 16624 28039 26413
2013 2073 6889 10158 17512 34288 29462
2014 2159 6679 12287 17278 30017 30250
2015 2440 6853 12824 16809 43855 35899
2016 3884 3775 13444 14005 53246 40760
2017 4242 859 14973 8815 55365 35507

 

Tableau 4 – Brevets octroyés et demandes de brevets dans la technologie solaire concentrée

Année OEB brevets octroyés OEB demandes de brevet déposées USPTO brevets octroyés USPTO demandes de brevet déposées Chine OBC brevets octroyés Chine OBC demandes de brevet déposées
2001 116 559 702 1154 69 293
2002 168 622 767 1191 115 389
2003 223 639 761 1409 183 544
2004 240 722 679 1613 298 694
2005 191 876 672 1893 324 1003
2006 254 1084 756 2209 396 1308
2007 224 1222 761 2548 621 1629
2008 252 1576 728 3055 791 2262
2009 269 1849 881 3670 1149 3316
2010 344 2153 1412 4367 1762 4460
2011 409 2143 1758 5103 2651 5540
2012 476 2092 2241 5017 3640 6177
2013 533 1925 2726 5142 4155 6323
2014 638 1843 3375 5055 4208 6348
2015 693 1815 3610 4896 6102 7741
2016 1080 958 3682 3699 7557 7771
2017 1218 152 3929 2400 7723 5862