Mon éditorial sur You Tube
Je reviens à ma recherche sur le marché de l’énergie. Je pense que l’idée théorique a suffisamment mûri. Enfin j’espère.
Dans un marché donné d’énergie il y a N = {i1, i2, …, in} consommateurs finaux, M = {j1, j2, …, jm} distributeurs et Z = {k1, k2, …, kz} fournisseurs primaires (producteurs). Les consommateurs finaux se caractérisent par un coefficient de consommation individuelle directe EC(i). Par analogie, chaque distributeur se caractérise par un coefficient de quantité d’énergie négociée EN(j) et chaque fournisseur primaire se caractérise par un coefficient individuel de production EP(k).
Le marché est à priori ouvert à l’échange avec d’autres marchés, aussi bien au niveau de la fourniture primaire d’énergie qu’à celui du négoce. En d’autres mots, les fournisseurs primaires peuvent exporter l’énergie et les distributeurs peuvent aussi bien exporter leurs surplus qu’importer de l’énergie des fournisseurs étranger pour balancer leur négoce. Logiquement, chaque fournisseur primaire se caractérise par une équation EP(k) = EPd(k) + EPx(k), où EPd signifie fourniture primaire sur le marché local et EPx symbolise l’exportation de l’énergie.
De même, chaque distributeur conduit son négoce d’énergie suivant l’équation EN(j) = ENd(j) + EI(j) + ENx(j) où ENx symbolise l’énergie exportée à l’étranger au niveau des relations entre distributeurs, EI est l’énergie importée et ENd est l’énergie distribuée dans le marché local.
L’offre totale OE d’énergie dans le marché en question suit l’équation OE = Z*[EPd(k) – EPx(k)] = M*[ENd(j) + EI(j) – ENx(j)]. Remarquons qu’une telle équation assume un équilibre local du type marshallien, donc le bilan de l’offre d’énergie et de la demande pour énergie se fait au niveau microéconomique des fournisseurs primaires et des distributeurs.
La consommation totale ET(i) d’énergie au niveau des consommateurs finaux est composée de la consommation individuelle directe EC(i) ainsi que de l’énergie ECT(i) consommée pour le transport et de l’énergie incorporée, comme bien intermédiaire ECB(i), dans les biens et services finaux consommés dans le marché en question. Ainsi donc ET(i) = EC(i) + ECT(i) + ECB(i).
La demande totale et finale DE d’énergie s’exprime donc comme
N*ET(i) = N*[EC(i) + ECT(i) + ECB(i)]
et suivant les assomptions précédentes elle est en équilibre local avec l’offre, donc
Z*[EPd(k) – EPx(k)] = N*[EC(i) + ECT(i) + ECB(i)]
aussi bien que
M*[ENd(j) + EI(j) – ENx(j)] = N*[EC(i) + ECT(i) + ECB(i)].
Avant que j’aille plus loin, une explication. Pour le moment j’assume que les coefficients individuels mentionnés plus haut sont des moyennes arithmétiques donc des valeurs espérées dans des ensembles structurées suivant des distributions normales (Gaussiennes). C’est une simplification qui me permet de formaliser théoriquement des « grosses » idées. Je pense que par la suite, j’aurai à faire des assomptions plus détaillées en ce qui concerne la distribution probabiliste de ces coefficients, mais ça, c’est pour plus tard.
Ça, c’était simple. Maintenant, le premier défi théorique que je perçois consiste à exprimer cette observation que j’avais faite il y a des mois de ça : les pays les plus pauvres sont aussi le moins pourvus en énergie. Au niveau du bilan énergétique la pauvreté se caractérise soit, carrément, par la quasi-absence de la consommation d’énergie niveau transport et niveau énergie incorporée dans les biens et services, soit par une quantité relativement petite dans ces deux catégories. C’est à mesure qu’on grimpe les échelons de richesse relative par tête d’habitant que les coefficients ECT(i) et ECB(i) prennent de la substance.
La seconde observation empirique à formaliser concerne la structure de la fourniture primaire d’énergie. Dans les pays les plus pauvres, l’énergie primaire est très largement fournie par ce que l’Agence Internationale d’Énergie définit élégamment comme « combustion des bio fuels » et qui veut tout simplement dire qu’une grande partie de la société n’a pas d’accès à l’électricité et ils se procurent leur énergie primaire en brûlant du bois et de la paille. Formellement, ça compte comme utilisation d’énergies renouvelables. Le bois et la paille, ça repousse, surtout cette dernière. Encore faut se souvenir que ce type d’énergétique est renouvelable au niveau de la source d’énergie mais pas au niveau du produit : le processus relâche du carbone dans l’atmosphère sans qu’on ait une idée vraiment claire comment faire retourner ce génie dans la lampe. La morale (partielle) du conte des fées est que lorsque vous voyez des nombres agrégés qui suggèrent la prévalence d’énergies renouvelables en Soudan du Sud, par exemple, alors ces renouvelables c’est du feu de paille très littéralement.
La différence empirique entre ces pays les plus pauvres et ceux légèrement plus opulents réside dans le fait que ces derniers ont un réseau de fourniture primaire d’électricité ainsi que de sa distribution et ce réseau dessert une large partie de la population. Ce phénomène se combine avec une percée originale d’énergies renouvelables dans les pays en voie de développement : des populations entières, surtout des populations rurales, gagnent l’accès à l’électricité vraiment 100% renouvelable, comme du photovoltaïque, directement à partir d’un monde sans électricité. Ils ne passent jamais par la phase d’électricité fournie à travers des grosses infrastructures industrielles que nous connaissons en Europe.
C’est justement la percée d’électricité dans une économie vraiment pauvre qui pousse cette dernière en avant sur la voie de développement. Comme j’étudie la base des données de la Banque Mondiale à propos de la consommation finale d’énergie par tête d’habitant, je pose une hypothèse de travail : lorsque ladite tête d’habitant dépasse le niveau de quelques 2326 kilowatt heures de consommation finale d’énergie par an, soit 200 kg d’équivalent pétrole, une société quasiment dépourvue d’économie régulière d’échange se transforme en une société qui produit et fait circuler des biens et des services.
Une fois ce cap franchi, le prochain semble se situer aux environs d’ET(i) égale à 600 ± 650 kg d’équivalent pétrole, soit 6 978,00 ± 7 559,50 kilowatt heures par an par tête d’habitant. Ça, c’est la différence entre des sociétés pauvres et en même temps instables socialement ainsi que politiquement d’une part, et celles dotées d’institutions bien assises et bien fonctionnelles. Rien qui ressemble à du paradis, au-dessus de ces 6 978,00 ± 7 559,50 kilowatt heures par an par tête d’habitant, néanmoins quelque chose qui au moins permet de construire un purgatoire bien organisé.
L’étape suivante est la transgression d’un autre seuil, que je devine intuitivement quelque part entre 16 240 kWh et 18 350 kWh par an par tête d’habitant. C’est plus ou moins le seuil officiel qui marque la limite inférieure de la catégorie « revenu moyen » dans la terminologie de la Banque Mondiale. C’est alors qu’on commence à observer des marchés bien développés est des structures institutionnelles tout à fait stables. Oui, les hommes politiques peuvent toujours faire des conneries, mais ces conneries sont immédiatement projetées contre un fonds d’ordre institutionnel et de ce fait sont possibles à contrecarrer de façon autre qu’une guerre civile. Une fois dans la catégorie « revenu moyen », une économie semble capable de transition secondaire vers les énergies renouvelables. C’est le passage des réseaux typiquement industriels, basés sur des grosses centrales électriques, coexistantes avec des réseaux de distribution fortement oligopolistes, vers des systèmes de fourniture d’énergie basés sur des installations locales puisant leur jus des sources renouvelables.
Finalement, à partir de quelques 3000 kg d’équivalent pétrole = 34 890 kWh par an par tête d’habitant c’est la catégorie des pays vraiment riches. En ce qui concerne les énergies renouvelables, des investissements vraiment systémiques commencent au-dessus de ce seuil. C’est une transition secondaire à forte vapeur.
Bon, je formalise. Une variable parmi celles que j’ai nommées quelques paragraphes plus tôt vient au premier plan : la consommation totale d’énergie par tête d’habitant ou ET(i) = EC(i) + ECT(i) + ECB(i). Les observations empiriques que je viens de décrire indiquent que dans le processus de développement économique des sociétés, le côté droit de l’équation ET(i) = EC(i) + ECT(i) + ECB(i) se déploie de gauche à droite. D’abord, il y a du EC(i). Les gens consomment de l’énergie pour leurs besoins le plus individuels et le plus directement possible. On brûle du bois ou de la paille et on a de l’énergie thermique pour faire de la cuisine, pour décontaminer l’eau et pour se chauffer. Si ça marche, des habitats humains permanents s’établissent.
Je sais que ça sonne comme le compte rendu d’évènements qui se passèrent à l’aube de la civilisation, mais après que j’ai étudié la situation des nations les plus pauvres du monde je sais aussi que c’est bien ce qui se passe dans des pays comme Niger ou Soudan. Le premier défi de ces populations consiste à faire marcher la structure sociale de base, donc à arriver au point quand les communautés locales sont capables de se développer et pour se développer lesdites communautés locales ont tout simplement besoin de s’établir sur une base relativement stable de nourriture et d’énergie.
Une fois que ce cap est franchi, donc une fois qu’ET(i) passe un seuil critique ET1(i), il y a un surplus d’énergie qui peut se traduire comme le développement du transport, ainsi que celui des marchés des biens et des services. En d’autres mots :
ET1(i) = 2 326 kWh
[EC(i) ≤ EC1(i)] => [ET(i) = EC(i) et ECT(i) ≈ 0 et ECB(i) ≈ 0]
[EC(i) > EC1(i)] => [ET(i) = EC(i) + ECT(i) + ECB(i) ; ECT(i) > 0 et ECB(i) > 0]
[EC(i) > EC1(i)] <=> [ECT(i) + ECB(i) = ET(i) – 2 326 kWh]
La seconde valeur critique, que je nomme ET2(i), donne lieu à l’émergence d’une structure institutionnelle suffisamment stable pour être appelée « ordre institutionnel ». Je sais que :
6 978,00 kWh ≤ ET2(i) ≤ 7 559,50 kWh
et que
4652 kWh < [ET2(i) – ET1(i)] ≤ 5233,5 kWh
et de même
{4652 kWh < [ECT(i) + ECB(i)] ≤ 5233,5 kWh}
ainsi que
[6 978,00 kWh ≤ ET2(i) ≤ 7 559,50 kWh] => ordre institutionnel
Alors vient ce troisième seuil, 16 240 kWh ≤ ET3(i) ≤ 18 350 kWh où la transition secondaire vers les énergies renouvelables devient possible. Cette transition prend donc lieu lorsque
13 914 kWh ≤ [ECT(i) + ECB(i)] ≤ 16 024 kWh
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